Être sur son x
Être sur son x, la première fois où j’ai entendu cette expression, c’était à la radio. On était dans la voiture, mon chum, mon fils et moi. Comme tous les jours, on se tapait 1 h 30 de trafic pour revenir à la maison.
Maripier Morin racontait qu’à ce moment précis de sa vie, tout semblait s’aligner. Elle était sur son x. J’ai tout de suite aimé cette expression, je la trouvais inspirante. Mais en y pensant, moi, je n’étais pas là, mais pas du tout.
J’étais plus sur le d, genre dépression. On vivait une vie de fou. On travaillait, mon chum et moi, pour une compagnie qui allait bientôt fermer ses portes. On restait là parce qu’on avait fait le choix d’avoir juste une voiture et on était un peu pris dans cet engrenage-là.
Ça engendrait trois heures de transport par jour. On arrivait à 18 h 30 à la maison, on soupait, donnait le bain du p’tit, l’histoire, le dodo en catastrophe et à 20 h 30, nous aussi on dormait pour se relever à 5 h. Le week-end, même combat ; je faisais le ménage, l’épicerie, la bouffe pour la semaine. Mon chum lui s’occupait de nos logements et des nombreux projets de réno entamés à la maison. On survivait.
Alors, sur mon x hein? Euh, non.
Néanmoins, j’avais des rêves. Et celui de changer le monde, je m’y accrochais. Ça faisait déjà trois ans que je pensais à ce que je pouvais faire.
L’hypocrisie des gens face aux problèmes environnementaux me troublait, la mienne aussi. Ce qui me déprimait par-dessus tout, c’était que tout ce que je savais faire et ce que j’exerçais comme profession participaient à faire tourner la roue de la surconsommation.
Car oui, j’aime vraiment la déco. L’intérieur des maisons me fascine. Pendant des années, j’en ai d’ailleurs fait mon gagne-pain comme designer dans un magasin de meuble renommé. Mon rôle était de créer des aménagements de rêve afin de mettre en valeur les produits et de stimuler les ventes. Si vous succombiez à la dernière tendance, c’est que j’avais bien fait mon travail. Quelle ironie… Paradoxalement, j’ai toujours eu en moi cette volonté de vouloir changer les choses, mais comme tout le monde, j’attendais que les autres agissent.
Finalement, la compagnie pour laquelle je travaillais a fermé définitivement ses portes et je me suis retrouvée avec du temps. J’ai utilisé ce temps pour me remettre en question. J’ai eu de longs questionnements, et c’est un jour, en regardant Pinterest, que je suis tombée sur des articles sur le #slowmovement et d’autres sur la #simplicité. Ensemble, ces deux philosophies décrivaient exactement mes valeurs et la façon dont je voulais vivre.
À ce moment, j’ai senti que c’était ça. Dorénavant, je miserais plutôt sur de petits gestes quotidiens et surtout sur le fait de ralentir, de consommer moins, de consommer mieux.
Parce que je crois en la valeur de chaque petits gestes, que ce soit de privilégier des fraises locales, acheter quelques trucs en vrac, manger moins de viande, acheter usagé, prendre les transports en commun, faire ses produits maison, peu importe l’initiative.
Malheureusement, je ne peux pas tout changer, alors j’ai combiné mon amour du beau et mon désir de faire ma part, pour créer un endroit offrant des objets aussi magnifiques que durables pour ceux et celles, qui comme moi, ont envie de faire une différence, afin que le monde de demain puisse en être un, tout aussi formidable que le nôtre.
Et si, par bonheur, cette initiative peut inspirer aux gens d’autres petits gestes, aussi minimes soient-ils, si le fait de partager mes expériences et de proposer de nouvelles alternatives peut amener d’autres gens à ralentir, à apprendre à vivre autrement la société de consommation et à renouer avec le bonheur, alors enfin je pourrai tracer mon x.